lundi 4 novembre 2013

Premeière partouse, trio, leçon de libertinage (5/5)


Samedi. Je me suis réveillée un peu avant midi. Hombre dormait toujours. Il m'a dit qu'il voulait prendre son temps, se reposer. Nous étions sortis tous les soirs de la semaine, jusqu'à cette apogée nocturne. Il ne se sentait pas le courage d'aller à Arles découvrir le sauna, il préférait qu'on passe la journée à se reposer, et qu'on sorte le soir.
Pourquoi pas à la nouvelle Chrysalide, à La Seyne sur Mer ? Il avait envie de retrouver l'ambiance anonyme de l'Absolu. Pour ma part, j'aspirais surtout à un bon jaccuzzi, mais comme la Chrysalide était censée faire club ET balnéo, j'ai acquiescé.

Je l'ai laissé au lit, j'ai posté un petit message de remerciement à Pierre et Alex, en « conversation de groupe » sur Facebook, et je suis sortie dans Marseille. Je voulais acheter des petits cadeaux pour les enfants qui rentraient le lendemain. J'avais remis ma robe à fleurs. Je me sentais bien, belle, forte, puissante. J'avais des courbatures et une confiance en moi à toute épreuve.
J'ai envoyé un SMS à mon amie Katia, et j'ai croqué à pleines dents dans un muffin au chocolat.
J'ai reçu un SMS.
Ce n'était pas la réponse de Katia.
C'était Alex.
Pierre avait eu un accident de voiture, cette nuit, en rentrant de chez nous.

Je me suis arrêtée, paralysée. Je me suis appuyée contre un mur et j'ai vomi dans le caniveau.
A priori, il n'avait rien de grave, il n'y avait que de la tôle froissée. Effet combiné de l'alcool et de la fatigue, il s'était endormi au volant. S'il s'était endormi quelques minutes plus tôt, alors qu'il était encore sur l'autoroute, il ne serait peut-être plus de ce monde.
J'avais honte. Un terrible sentiment de culpabilité s'est emparé de moi. Parce que nous l'avions laissé repartir.
Il nous avait dit qu'Alex et lui avaient un contrat de courtoisie, qui consistait à toujours rentrer dormir dans le lit conjugal.
Mais nous aurions pu respecter ça tout en lui suggérant de se reposer une heure avant de repartir. Nous aurions pu cesser de remplir son verre de vin aussi.
Quelques minutes avant qu'il ne parte, alors qu'on lui demandait bêtement s'il était sûr d'être en état de rentrer, il nous avait dit « - La voiture connait le chemin, elle rentrera seule ».
Et nous l'avions laissé repartir quand même.

Je suis rentrée et avec Hombre, on s'est attablé autour d'un café.
On était dans un drôle d'état. Par moments, nous étions toujours portés par l'extraordinaire énergie sexuelle toujours présente dans l'atmosphère, et nous avons fait l'amour un nombre de fois incalculables, bien souvent en se remémorant nos frasques nocturnes, en utilisant à nouveau les cordes qui étaient resté accrochées au quatre pieds du lit. A d'autres moments, nous avions des conversations plus graves et plus sérieuses. Autour des risques que nous avions pris.
Nous avions pris le risque de laisser Pierre repartir. C'est LE vrai risque.
Mais il y avait derrière l'ombre d'autres risques. A un moment, j'avais commencé à lui faire une fellation sans préservatif. Remontant à partir de la base, me disant plus ou moins que tant que je ne touchais pas le gland, tout irait bien. Et Hombre n'avait rien dit, il ne m'avait pas arrêtée.
Nous avions aussi laissé Pierre me faire un cunnilingus, alors qu'au départ, nous avions dit que ça ne ferait pas partie de nos pratiques.

Depuis deux jours, j'avais des conversations sur Internet avec la jeune Violette, qui n'était pas venue à notre repas libertin. Son compagnon et elle avaient eu des rapports libertins non protégés. Nous avons dressé ensemble la liste des différents risques liés aux rapports bucco-génitaux, les différents IST et leurs modes de transmission... Je l'ai orientée vers le CIDAG où ils iraient faire leurs tests la semaine suivante.

Concrètement, Hombre et moi n'avions pas pris de risque pour notre santé « virale ». : dans un cunnilingus, le risque potentiel est surtout pour celui qui le fait, et dans mon cas, Pierre n'avait absolument rien à craindre.
Mais il y avait le risque symbolique.
Hombre et moi avions, a priori, fixé nos limites.
Et pendant la nuit, nous les avons changées sans en parler.
Peu importe que les limites soient bonnes ou mauvaise, ou le fait qu'au final, nous en serions sûrement arrivés à accepter l'idée du cunnilingus sans protection. Peu importe que cette nuit fut époustouflante, il n'était pas question de revenir là dessus. Mais c'est le fait de ne pas avoir respecté notre « code » qui nous a semblé dangereux et à ne pas reproduire.. Le fait d'avoir perdu la tête à ce point

Cette nuit là a compté pour nous, elle nous revenait en bouffées émotives. Hombre me disait que nous ne vivrions plus jamais quelque chose d'aussi intense, d'aussi extraordinaire. Je pense qu'il a raison. C'est comme un paradis perdu : il y a l'intensité de « la première fois ». Je peux un peu comparer ça à ma première nuit avec Hombre, ou à ma première vraie sodomie. Ce moment est d'autant plus intense qu'il porte en lui la peur et l'excitation de la nouveauté. Cette nuit restera gravée en nous, c'est une certitude.

Mais jusqu'à ce que nous en reparlions, cette nuit portait aussi en elle un malaise, qui allait plus loin que le fait d'avoir franchi un tabou ou un interdit. Hombre me disait qu'il n'était pas jaloux, qu'il ne s'était pas senti en danger, mais qu'il avait l'impression que parfois, quelque chose avait fonctionné de travers. Que je m'étais retrouvée avec Pierre, à certains moments où j'aurais du être avec lui.
J'ai fini par comprendre qu'il parlait des moments creux entre deux actions, où la tension sexuelle était retombée (enfin, où elle était retombée chez les hommes, chez moi elle ne retombait jamais et chaque orgasme semblait servir de préliminaire à celui qui viendrait après, c'est sans doute une différence physiologique entre les hommes et les femmes...)

La réponse m'est apparue en discutant avec un ami conteur.
Il m'expliquait l'importance d'ouvrir et de refermer «  l'espace du conte » quand on parle à des enfants. Quand on a ouvert, par des formulettes, cet espace, on peut leur raconter des choses effrayantes, des loups qui mangent des enfants, mais il faut prendre soin de refermer cette fenêtre ensuite. Si on raconte l'histoire d'un loup qui mange un enfant, sans avoir dit une formule, pris une intonation, qui indique qu'on est dans la symbolique du conte, les enfants peuvent percevoir ce qui est raconté comme « la réalité », et faire des cauchemars.

Peut-être aurions nous du définir une sorte de « d'espace du temps sexuel ».
Je vois parfaitement le moment où cet « espace sexuel » s'est ouvert, à la fin du repas, quand Hombre a changé de musique, poussé la table, et nous a invités à danser. Mais nous ne l'avons pas refermé. Quand Pierre est parti, il était habillé, prêt à conduire, à retourner dans sa vie, alors que nous étions encore nus, nous nous touchions, nous étions encore dans « l'espace sexuel ».
Il y avait un décalage.

Sans forcément nous rhabiller entièrement, je me dis maintenant que Hombre et moi nous aurions du enfiler un peignoir, signifier clairement par cet acte là que la soirée était terminée.
Et dans ce cadre, la remarque de Pierre sur la jalousie au moment de son départ pouvait avoir un sens.
Hors de « l'espace sexuel », il n'était pas normal et pas correct que je l'embrasse sur la bouche. Lui qui était habillé et prêt à rentrer chez lui, ça l'avait peut-être gêné, mis mal à l'aise. Je me dis avec le recul qu'à ce moment là, mon comportement fut déplacé. Hombre et moi aurions du être partiellement vêtus, et nous aurions du lui faire tous les deux la bise comme lorsqu'il est arrivé, comme nous le ferons les prochaines fois que nous nous verrons.
C'est une erreur de débutant.
Hombre m'a fait remarquer qu'Alex savait sûrement ce genre de choses, que elle, elle n'aurait sûrement pas commis la même erreur. C'était peut-être ce qu'elle avait essayé de nous dire avec sa remarque sur Facebook : avant et après le « temps du jeu », on ne joue pas. Sinon, ça devient compliqué.
.
J'ai repensé à Wismerhill, qui m'avait parlé de leur principe « au téléphone, les hommes parlent aux hommes, et les femmes aux femmes ».
Ces limites artificielles sont des symboles, les garde fous que se fixent des personnes seules, ou des couples, pour conserver une partie de contrôle, et être sûrs de ne pas faire des choses qu'ils regretteraient par la suite. Ce ne sont pas les limites en elles mêmes qui comptent, c'est le fait, pour le couple, de les fixer ensemble, de pouvoir s'appuyer sur elles.

Alors voilà.
Voilà que cette liberté libertine, pour nous, allait s'accompagner de règles ?
Pas de règles qui contraignent, qui remplacent un carcan par un autre, mais de règles qui libèrent car elles rassurent et nous protègent.
A ce moment là je me suis dit que définitivement, nous ne serions pas dans le camps des « sans prise de tête » qui nous fait tant rire chaque fois qu'il apparaît sur une fiche. Pour Hombre et moi, la tête sera toujours bien vissée sur les épaules, et prendra sa part dans nos futures rencontres, quelles qu'elles soient. Sinon ?
Sinon la peur du chaos m'empêcherait sûrement de continuer.

Nous avons passé des heures à parler. A décider de ce qu'on accepterait à l'avenir ou pas, en club ou en privé, les pratiques sexuelles, les protections, et surtout, à se dire qu'on ne dérogerait jamais de nos règles au milieu d'une soirée. Si ces règles nous semblent mauvaises nous en discuterons, à deux, comme un débriefing, nous les changerons peut être ensuite, mais plus tard, pas dans le feu de l'action.

Samedi soir nous sommes allés à la Chrysalide. Le lieu était très chouette mais nous n'étions pas dedans, nous avions comme une over-dose sexuelle, même si j'ai beaucoup apprécié le fait de m'habiller de nouveau hyper sexy, et de danser de façon très suggestive, tout en gagnant des cadeaux Freixenet, la boisson de Barcelonne...
L'effet boomerang de notre extraordinaire « soirée trio » commençait à se tasser un peu. On allait récupérer les enfants, on avait tout mis à plat.
Pourtant, un léger malaise persistait encore en moi, je l'ai confié à Hombre.

- Tu as passé une nuit pleine de plaisir n'est-ce pas ?
- Oui.
- En partie parce que tu le désirais ?
- Oui, bien sûr que je le désirais, c'était évidement autre chose que les mecs que j'ai sucés en club jusqu'à présent.
- Tu ne dois pas te sentir coupable de ça. Moi j'ai aimé que tu fasses l'amour avec un homme que tu désires.

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POUR AVOIR LE TEXTE ENTIER, CE SERA DANS LE LIVRE " CHRONIQUES LIBERTINES", PARUTION DERNIER TRIMESTRE 2018 AUX EDITIONS FILOSPHERES....
http://filosphere.free.fr/2/crbst_21.html

BISES.

PANDEMOS.

4 commentaires:

  1. bonjour les GF suite à la disparition du post sur docti, je viens renouveler mon commentaire
    Un mot MERCI pour ce récit qui vous dévoile mais qui nous attachent à vous et vos ressentis
    continuer et bonne chance pour l'editeur
    Azul Korsu' LOÏC

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  2. Bon. Ben, cette fois, vous voilà lancés...

    C'est joliment écrit, bonne navigation sur ces eaux troubles!!!

    Bises libertines à vous deux

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  3. Sans doute à classer dans les ressentis les plus fouillés que j'ai pu lire.
    Cette sincèrité , cette mise à nu m'a longuement fait m'interroger sur nos propres pratiques et les zônes d'ombre qui subsistent malgré les années de sortie.

    Au plaisir de vous lire

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  4. Au plaisir de vous lire. Beau récit !

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